Tribune de Laurent Joffrin dans l'Obs
TRIBUNE. Mélenchon a une chance de se qualifier au second tour : faut-il voter pour lui et chasser du jeu l’extrême droite ? Le président de « Engageons-nous », soutien d’Anne Hidalgo, considère que ce serait un mauvais service à faire à la gauche pour les cinq ans à venir.
Mélenchon, dit-on dans une partie de la gauche, c’est le « vote utile ». Sur la foi des sondages – ceux que La France insoumise qualifie « d’horoscope », mais qui servent de base à son argumentation – les partisans du Lider maximo répandent l’idée que leur candidat est désormais le seul qui puisse réaliser un score honorable. Vote utile, donc. Mais utile à qui ? A Mélenchon, certainement. Et à la gauche ? C’est là que tout se complique…
En un mois, tout peut encore changer. Mais si, en revanche, les sondages d’aujourd’hui annoncent peu ou prou les résultats de demain, on voit d’ici le paysage politique qui se dessine pour les années qui viennent. Un parti central dominant la scène de la tête et des épaules, face à une extrême droite divisée mais forte, une droite qui tente de survivre et une gauche réduite à la portion congrue. Une vie politique atrophiée dans sa représentation, réduite à l’opposition entre fermeture et ouverture du pays, sans que les autres questions, pourtant tout aussi importantes – les inégalités sociales, la réindustrialisation, la mutation écologique, le déchirement communautaire, etc. – soient vraiment débattues, sinon au sein du parti majoritaire, pour être tranchées par un seul homme, Emmanuel Macron, dont le tropisme libéral s’affirme de plus en plus…